vendredi 26 janvier 2018

Compte-rendu du 21e soir

D'un jour à l'autre, d'un bénévole à l'autre le lien se tisse avec les personnes de la rue accueillies dans le cadre d'Hiver solidaire à Saint-Vincent-de-Paul.
Le compte-rendu du matin, comme un passage de relais, témoigne chaque jour de ces moments partagés.

Mardi 23 janvier, Marion, Anna, Davide et Roland ont accompagné, Olivier, Nouri, Moussa, Soro et Soulymane.


« Que s’est-il passé ? c’est toujours difficile à dire, tant les témoignages humains sont parfois contradictoires. Ce qui est sûr, c’est qu’à l’ouverture de la porte Nouri est arrivé avec une bouteille, et qu’il a frappé Soro. Il a fallu immobiliser Nouri qui souhaitait continuer son agression, alors que Soro sous le choc restait impassible, mais relativement plein de sang.
Heureusement, il s’avéra que la blessure était bénigne.
Quoiqu’il en soit, Nouri fut déclaré persona non grata.
C’est dans le tumulte qu’arrivèrent nos charmantes bénévoles repas, Marion habituée de HS prit sous sa coupe Anna qui venait pour la première fois (mais pas la dernière m’a-t-elle dit en partant).

Autoportrait à l’oreille bandée, 1889,
Vincent Van Gogh (1853-1890),
huile sur toile, 50 x 60,5 cm, Londres, The Courtauld Gallery
Nettoyage de Soro, contact avec Damien, voilà un début de soirée inhabituel. Avec Davide nous décidons de ressortir pour faire le point avec Nouri pour lui expliquer que notre porte resterait fermé à lui ce soir.
De cette discussion, il en ressort une grande frustration à l’idée que nous accueillons des migrants, qui plus est africains, juste arrivés en France, alors que Nouri et ses copains sont là depuis des années.
C’est donc vers 9h00 que nous intégrons la table, entièrement et exclusivement installé par Olivier qui a profité du temps pour faire en plus un grand ménage du côté « chambre ».

Soro se plaignant de douleur à la tête nous nous décidons à appeler SOS Médecins. Ceux-ci refuse de se déplacer et nous invite à saisir le SAMU ! Finalement ce fut une sage décision, puisqu’en moins de 10 minutes le fourgon de la Caserne de la rue Blanche arrivait. Trois pompiers attentifs firent le check-up de Soro. Ils nous rassuraient mais surtout rassuraient Soro sur son état de santé.
Cela eu pour effet de « réveiller » la soirée. L’excellente soupe de Carottes-miel-gingembre de Marion fut terminé (sauf une part pour Souleyman au petit déjeuner) puis Anna nous livra son riz-lentilles champignons. Cela ne peut s’appeler risotto, comme nous le dit Anna, étudiante italienne en philosophie, qui avait commencé à en disserter avec Davide et Souleyman, au point qu’une nouvelle fois je fus dans l’obligation de demander à ce que l’on parle français à table : l’italien n’étant pas compris par tous !
Pour information, avant d’arriver en France, Souleymane a longtemps vécu en Italie.
Sur ce, le fondant au chocolat de Marion raviva les papilles (sauf Moussa qui n’aime pas le chocolat).
Nos échanges revinrent sur l’Afrique et la traversée de Soro qui à l’origine souhaitait rejoindre l’Algérie, jusqu’à ce qu’il soit « détourné » sur la Libye, et emprisonné contre rançon. Un libyen l’a sorti contre rétribution à ses gardiens, et Soro a travaillé et jardiné dans sa maison. Puis, il a été emmené à Tripoli pour embarquer sur un matelas gonflable. Le moteur fut retiré par les passeurs libyens à l’entrée des eaux internationales et tous les occupants furent sauvé par un bateau français qui les emmena à Naples en 5 jours.
L’histoire est à compléter, 2 migrantes auraient perdu la vie à l’embarquement.
Il était près de 23 h quand nos pompiers firent un bref retour ayant oublié une mallette que nous n’avions pas encore eu le temps de découvrir.
Réveil 7 h sans souci Départ 8 h en présence de Damien.»