dimanche 8 mars 2020

Compte-rendu du 65e soir d'Hiver Solidaire 2020


D'un soir à l'autre, d'un bénévole à l'autre un lien se noue avec les personnes de la rue accueillies dans le cadre d'Hiver solidaire à Saint-Vincent-de-Paul. 

Le compte-rendu du matin, comme un passage de relais, témoigne chaque jour de ces moments partagés.

Samedi 7 mars, Ahmed, Bah, Daniel, Petru et Roberto ont été accueillis par Muriel, Loïc et Pierre.


Rémus et Romulus allaités par la Louve romaine, Annibale Carrache (1560-1609
et ses frères Agostino et Lodovico, peinture à fresque, Italie, Bologne, palais Magnani.
À l’ouverture des portes à 20 heures il n’y a personne mais cinq minutes plus tard nous sommes six. Le protocole de désinfection est scrupuleusement suivi par tous et la table rondement mise. 
Prière et litanies de Petru sont écoutées dans un silence respectueux puis on se met à table vers 20 h 30 sans attendre Roberto et Samson. L’entrée, constituée par une soupe carottes, curry et lait de coco préparée par Muriel est avalée à grandes lampées sonores...interrompues par l’arrivée fracassante de Roberto qui exprime dans un espagnol saccadé son indignation d’avoir trouvé portes fermées malgré ses appels répétés. On comprend qu’il a escaladé la grille pour entrer. 
Le dîner se poursuit avec la dégustation du ragoût de saumon et colin avec crevettes et poulpe, sauce à la béchamel, de Diane, qui a pour effet d’amadouer toute l’assistance, y compris Roberto qui se détend peu à peu. Et comme si cela ne suffisait pas, au fromage succède une extraordinaire salade de fruits issus d’un maraîcher rue Caulaincourt que Muriel qualifie de meilleur de Paris.
La dégustation de ces plats nuit dans un premier temps à la discussion mais très vite après elle débute avec la description par Daniel du rôle de la mythologie dans la naissance de toutes les civilisations et - vous l’avez deviné - la lutte contre le coronavirus. Chacun s’exprime, sauf Roberto très muet dans son coin, et chacun apprend quelque chose, par exemple que l’Italie est plus durement touchée parce que sa population est la seconde plus âgée au monde, après celle du Japon, ou encore qu’en France beaucoup d’entreprises réduisent considérablement les voyages d’affaires, avec les conséquences que l’on peut imaginer. 
Roberto sort alors de son mutisme pour expliquer comment les diverses mafias contrôlent la planète. Loïc s’entretient avec Bah de la Genèse que ce dernier vient de lire. Il nous apprend qu’après avoir lu le Coran il veut lire la Bible.
Pendant tout ce temps, aucune nouvelle de Samson. Muriel nous quitte vers 21 h 40 et la vaisselle est faite par Ahmed, Bah et Loïc, mais sans aide de Daniel ou Roberto. Tous les accueillis sont couchés vers 22 h 45 et l’extinction totale des feux intervient à 23 h 30 après une dernière vérification au cas où Samson attendrait dehors. 
Nuit sans histoires, tour à tour ronflante et silencieuse. Au réveil l’atmosphère est languie et conviviale. Daniel, décidément en verve, livre sa pensée sur l’insignifiance de l’homme face au cosmos. La plonge et le rangement sont assurés, toujours par les trois susnommés. Enfin, rangement des bancs comme nous l’a demandé Damien puis départ général à 9 h 20.